Farouche défenseur des Lumières, Amin Maalouf dresse le constat de tous les manquements que ce siècle accumule au nom du progrès, de la démocratie, de la justice sociale. Désastres écologiques, guerres « civilisatrices », nationalismes, dictatures… Dans Les Identités meurtrières, Maalouf, le Libanais, de souche arabe mais chrétien, d’expression française et vivant en Bretagne, démontrait déjà l’absurdité du repli identitaire. Ne sommes-nous pas tous multiples ?
Très pessimiste quant à l’avenir de l’humanité, Le dérèglement du monde revient sur les origines historiques de la montée de l’incompréhension entre le Moyen-Orient et le monde occidental. Zéro partout, torts partagés, compte l’arbitre. Manque d’éthique d’un côté, esprit colonial de l’autre, ont abouti à une crispation des préjugés, et sont en passe de se cristalliser en haine de l’autre. Face à cette impasse explosive, Amin Maalouf plaide pour une refondation de nos valeurs communes, une invention d’autres rapports culturels, spirituels, ouverts à l’autre mais aussi à une réelle politique d’immigration, faite de droits et de devoirs. Il met en garde l’Europe contre sa cécité, sa frilosité comme dirait Elie Barnavi, et l’enjoint à retrouver son rôle de phare intellectuel. Faute de quoi, les « identités meurtries se feront meurtrières ».
Amin Maalouf : Le dérèglement du monde, essai, Grasset, 317p.