Passé à un cheveu du Goncourt, ce roman vient de recevoir Le Prix des Cinq Continents de la Francophonie, mais est aussi lauréat du Prix Liste Goncourt/Le choix de l'Orient décerné chaque année à Beyrouth. Bel hommage à la langue française, dans laquelle l’auteur algérien prend le relais du Camus de L’Etranger. Meursault y tuait l’Arabe, un anonyme auquel Kamel Daoud donne une identité et un frère. Dans un bar, à un interlocuteur prêt à l’écouter, il dit le poids de ce cadavre sur sa propre vie, l’injonction tacite à venger cette mort absurde, la spirale de la violence. Ce soliloque d’une rare intelligence, remarquablement construit, est traversé d’une multitude de thèmes, depuis la colonisation, jusqu’à l’Algérie d’aujourd’hui envahie cette fois par une islamisation qui colonise les esprits. Et si l’Algérie n’avait besoin de personne d’autre qu’elle-même pour se tirer dans le dos ?
Un livre remarquable, audacieux, qui porte la voix de l'autre, qui enfin prend la parole.
Kamel Daoud : Meursault, contre-enquête, Actes Sud / Barzakh, 2014, 153p.
Meursault, contre-enquête, a d'abord été publié en 2013 à Alger aux Editions Barzakh.
Le Prix Liste Goncourt / Le choix de l'Orient est organisé par l’Institut français du Liban et le Bureau Moyen-Orient de l'AUF. Il a été décerné le 2 novembre 2014 à Kamel Daoud. En 2013, c'est Sorj Chalandon qui l'avait reçu pour son roman "Le quatrième mur".