La vie est une chose précieuse qui ne devrait jamais s’éteindre : voilà ce qu’on peut retenir du dernier texte traduit de Yan Lianke.
Le propos est simple : un vieillard s’apprête à quitter son village, frappé par la sécheresse, en même temps que tous les autres habitants du lieu. Puis il se ravise : il a en effet découvert, dans son champ, une unique pousse de maïs juste éclose ; il décide de rester pour veiller sur elle.
Notre homme demeure donc seul. A tenter l’impossible : trouver de l’eau alors qu’il n’y en a pas ; boire et se nourrir lui-même, alors que les villageois ont tout emporté ; lutter contre les rats qui s’attaquent au fragile plant, ou contre d’autres bêtes beaucoup plus effrayantes qui rôdent. Et toujours, il conserve cette unique idée en tête : permettre au maïs de se développer, jusqu’à donner un fruit que le vieillard pourra ensuite replanter, etc.
La fable de Yan est belle à plusieurs titres. Elle fourmille d’inventions plus ingénieuses les unes que les autres, par lesquelles notre homme parvient à maintenir sa culture en vie. Pour cela, il se sert de son propre corps, ou des rats qui l’envahissent, mais qui deviennent au final bénéfiques. L’écriture est également riche : autour du maïs, nulle eau, mais dans tout le texte, les images convoquant l’élément liquide sont omniprésentes. Enfin, ce n’est pas un hasard si l’auteur a choisi un vieil homme pour conserver cette pousse : vie et mort s’entremêlent ainsi subtilement dans le cycle plus vaste de ce qui a précédé, et de ce qui suivra.
Ou comment, avec une apparente économie de moyens, dire beaucoup…
Yan Lianke : Les jours, les mois, les années, traduit du chinois par Brigitte Guilbaud, P. Picquier, 2009, 13€