En sept stations hallucinées, Donald Ray Pollock, suit le calvaire d'une Amérique de faux dévots et de vrais pourris. « Le Diable est partout » (Albin Michel), surtout en Ohio.
Dès la première ligne, le lecteur est accroché aux basques d'un garçon de dix ans et ne le lâchera plus pendant trois cents pages. « En un triste matin de la fin d'un mois d'octobre pluvieux, Arvin Eugene Russel se hâtait derrière son père, Willard, le long de la pâture dominant un long val rocailleux du nom de Knockemstiff dans le sud de l'Ohio. » Sur leurs pas, l'auteur creuse son sillon dans la veine, la déveine de sa propre terre natale, trou perdu peuplé de consanguins. C'est le monde de « Délivrance », le film de John Boorman, l'horreur se niche dans une nature grandiose qui n'abrite que misère humaine, infamie et abandon. Et pourtant, Donald Ray Pollock donne à ce monde habité par le Mal, une sorte de grâce et de lévitation, comme si par l'écrit, il sauvait ce qui peut l'être, quand toute autre rédemption est impossible. Parfois, il y a un miracle, l'auteur de ce livre implacable, a eu le sien. Après trente-deux ans d'abattoir et d'usine, il a obtenu une bourse universitaire, publié un recueil de nouvelles, « Knockemstiff » déjà, encore, qui a autant impressionné que ce livre, parmi les meilleurs de l'année dernière aux Etats-Unis.
Donald Ray Pollock : Le Diable est partout, roman traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Christophe Mercier, Albin Michel, 2012, 369p, €24,70.