Un roman intelligent et captivant, par un des meilleurs (à nos yeux) écrivains anglais, histoire d'amour, roman d'espionnage, et en même temps livre qui parle de littérature.
Back to the early seventies..., en ces années difficiles pour la Grande-Bretagne, marquées par les grandes grèves des mineurs, la crise de l'énergie (on avait un moment instauré la semaine de trois jours !), l'instabilité gouvernementale, l'intensité du conflit en Irlande du Nord, et... la guerre froide. On a un peu oublié cela aujourd'hui, mais cette guerre froide était aussi une guerre des idées, avec l'objectif de séduire une intelligentsia qui penchait trop souvent à gauche, en lui apportant, sous couvert de fondations privées, des moyens d'existence provenant en réalité de fonds secrets. Sweet tooth, amateurs de sucreries, ou de douceurs, succombent...
C'est une histoire de ce type que nous raconte Ian McEwan, avec Serena, jeune intellectuelle fraîchement issue de l'Université du Sussex, recrutée par le MI5 (les services secrets), et chargée d'entrer en contact avec un un jeune et brillant auteur, Tom Haley, avec pour but de l'amener à défendre les valeurs du monde occidental. Les choses ne se passeront évidemment pas tout à fait comme prévu. C'était oublier la fascination pour la littérature, qui ne s'en laisse pas conter et reste libre, à l'image de ces textes écrits par Haley, et qui sont d'ailleurs une des clefs du roman. C'était aussi oublier le sentiment amoureux, qui supporte difficilement la trahison.
Extrêmement bien mené, ce roman, vaguement nostalgique pour ceux qui ont connu l'Angleterre de l'époque, est aussi un miroir où se reflète l'entrée en littérature du jeune McEwan. Un écrivain qui a fait du chemin d'ailleurs. Pour preuve la fin du livre, mise en abîme d'un récit qui impose un retour à la case départ. Ceux qui liront comprendront.
Ian McEwan : Opération sweet tooth, traduit (très bien) de l'anglais par France Camus-Pichon, Gallimard, 2014, 440p.
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