Monsieur Linh fuit son pays en guerre où sa famille a été décimée. Il a pour bagage, une valise, une photo, une poignée de sa terre natale et dans les bras, une petite fille toujours calme et sereine. Arrivés à New York, l’homme et l’enfant sont accueillis dans un foyer pour réfugiés où le vieil homme est souvent la risée de ses compagnons d’infortune.Il prend alors l’habitude de se promener dans la ville. Il y rencontre Monsieur Bark, veuf malheureux.Les deux hommes se parlent, chacun dans sa langue mais cour à cour. Et ils se comprennent grâce à la musique de la voix, à l’intensité de leurs sentiments, à la force des gestes et des attentions. Mais Monsieur Linh est transféré et enfermé dans un hospice dont il ne cessera de vouloir s’évader.
Drame de la solitude et de l’indifférence, hymne à l’amitié et à la compassion, ce roman est juste, dense et émouvant.
Philippe Claudel
La petite fille de Monsieur Linh
Stock
Parmi les nombreux premiers romans de la rentrée, il faut certainement mettre en valeur celui de Marie-Eve Stenuit, tant pour ses qualités romanesques que pour son style.
Tout commence dans la vie par la naissance, une scène d’accouchement, une ambiance tendue. Lisa a donné la vie à un enfant double : « De la tête aux épaules, Lisa avait deux fils ; plus bas, elle n’en avait qu’un. »
Le premier médecin qui se précipite à son chevet veut les palper (curiosité médicale ?) et les montrer. Voilà le destin des deux garçons : être regardés ! Nous partons avec eux dans le monde pour qu’ils accomplissent leur destin, et rencontrons avec eux tous les êtres difformes montrés dans les cirques et champs de foires. Nous rencontrons avec eux des êtres difformes, certes, mais chaleureux, intelligents, lucides, des êtres humains à part entière avec toutes les capacités d’amour et d’amitié. Vingt années d’exhibition au terme desquelles les frères devenus riches rentrent au pays, achètent une maison et prennent leur retraite. Ils vivent alors, loin des regards, une vie discrète dont on ne sait pas grand-chose sinon qu’ils furent heureux, sereins et. amoureux !
Librement inspiré d’une histoire vraie, ce roman est généreux, souvent drôle et en même temps intéressant car il pose de nombreuses questions sur l’identité et sur l’humanité et sa morale.
Marie-Eve Stenuit
Les frères Y
Castor Astral
Nouveau roman de Denis Lachaud (J’apprends l’allemand, 1998), Le vrai est au coffre aborde avec intelligence (la forme défend, soutient et reprend la thématique dans toute son ambiguïté) et sobriété (une écriture nuancée et pleine de tendresse) la question de la difficulté identitaire.
Soit un enfant de cinq ans, Tom, qui vit avec ses parents dans un quartier porche de Paris. Très vite, Tom s’éloigne des autres – les garçons – qui le rejettent et le traitent de « pédale », il passe ses journées avec Véronique, une amie rencontrée dans la cité des Fleurs. Mais lors d’un voyage scolaire Tom est finalement rattrapé par ses « camarades ».
Voyage dans l’imaginaire, dans les trésors et la solitude de l’enfance, livre à clef, le nouveau Lachaud est aussi un des bons livres de la rentrée 2005.
Denis Lachaud
Le vrai est au coffre
Actes Sud