Très remarqué à sa sortie en Angleterre, par l'Orange Prize, dans la catégorie des nouveaux auteurs, qui avait déjà révélé Zadie Smith, Rose Tremain et Barbara Kingsolver, « Saison de lumière » est un premier roman très abouti. Il emporte le lecteur du smog de Londres au soleil d'Espagne des années 50. Poussée dès l'enfance par une capacité à saisir par le trait les beautés du quotidien, une jeune peintre, vit dans l'ombre d'un mari artiste et flamboyant. Charge d'épouse, de mère, de femme s'estompent peu à peu sous les jaunes et les bleus d'un talent éclatant, lancé par le marché de l'art. On songe au Cadaques de Dali pour le décor, au tempérament d'une Frida Kahlo et aux abstractions frémissantes d'un Nicolas de Staël au feminin, dans ce portrait d'une peintre livrée au combat de la création d'elle-même.
Francesca Kay : Saison de lumière, Plon
Après nous avoir permis de redécouvrir l'irrévérencieux Edgar Hilsenrath, ou encore Ramon Sender, la petite maison Attila nous entraîne sur les chemins de l'Amérique du Sud. L'auteur n'est cette fois pas un "ancien oublié", comme pour les deux précédents, mais un ancien (né dans les années 30 en Argentine), qui n'a jamais fait publier ses textes !
On ne peut pas s'empêcher de s'arrêter un instant sur l'objet. Attila a une nouvelle fois réalisé un travail soigné, en jouant exclusivement sur trois couleurs pour les dessins qui illustrent le livre : noir, blanc, mais aussi rouge. On retrouve ces teintes dans le corps même du texte, et sur la couverture. De la belle ouvrage !
Parlons enfin du propos. Palabres est une fable. C'est une fable sur la rencontre de deux mondes, sur le pouvoir également. Face à face deux peuplades, les Guardanais et les Farugios ; les premiers sont des industrieux, les seconds des paysans. Une simple question d'abord anodine, "Comment va?", les amène à se rencontrer, mais l'absurde s'en mêle, et la guerre n'est pas loin... Ajoutez à cela trois berlinois perdus dans la cambrousse, et si chacun tire la couverture à soi, c'est la zizanie assurée !
Un texte rythmé, inventif, et ô combien ironique, voici Palabres.
Pas Sidney n’a pas eu de chance pour son prénom. Sa mère n’a rien trouvé de mieux que « Pas Sidney ». L’autre problème c’est que son nom de famille est Poitier.
Autant dire qu’il a assez durement vécu ses jeunes années (vous imaginez dans la cour de récré). Par contre, son excentrique mère avait mis un sacré paquet d’argent de côté et, on a beau dire, ça aide, surtout quand on a un prénom pareil.
Orphelin à 10 ans, il est recueilli par un milliardaire loufoque et élevé par une nounou féministe à grosses cuisses. Quand il décide de partir à la conquête de son identité, les ennuis commencent.
Ce roman est un véritable petit bijou d’humour absurde (mais lisible), à l’opposé intersidéral de la production littéraire actuelle, atteinte de morosité ambiante aiguë. Percival Everett parvient à nous amuser sur un ton badin tout en passant à la moulinette les archétypes de la culture américaine. Le héros rate assez systématiquement ce qu’il entreprend, l’argent fait le bonheur et les riches sont fous mais sympas, les bonnes sœurs partent avec le premier porte-monnaie venu, les profs ne servent à rien, la famille n’est plus un noyau de sécurité mais la concentration de diverses névroses. Et les Noirs sont racistes aussi. Et tout ça sans en avoir l’air.
Percival Everett, Pas Sidney Poitier, Actes Sud, 2011.