Il y a soixante ans, décédait Django Reinhardt, musicien et compositeur unique en son genre, né à Liberchies près de Charleroi. Handicapé par deux doigts atrophiés, suite à l'incendie de sa roulotte, Django le gitan inventa un genre que d'autres appelèrent jazz manouche. Alexis Salatko le raconte dans un roman biographique, Folles de Django (Robert Laffont) et révèle un fait méconnu de son histoire. Une Belge, Maggie Kuipers, oubliée de tous, le sortit des faubourgs boueux de Paris et le propulsa dans le monde des cabarets pour lui faire rencontrer ceux qui feront de lui une vedette. Pendant plus de dix ans, elle veillera sur lui, et tentera de le faire passer en Suisse pendant l'occupation nazie. Elle réussira pour Mendès-France et le frère handicapé de De Gaulle mais y laissera sa vie.

Comme avant lui Alain Gerber racontait Chet Baker, Alexis Salatko swingue sur la vie de Django avec une empathie totale pour celui qui renonça à la musique, lui préférant...la pêche à la ligne, alors que les plus grands l'admiraient (Duke Ellington, Armstrong). Mais jamais il ne renonça à sa liberté.

Alexis Salatko : Folles de Django, Robert Laffont, 2013, 276p.

« Il y a des gens à qui le vert ne sera jamais tendre » écrit David Bosc, songeant à l'ami Baudelaire, allergique à la nature. Courbet a fait de lui un portrait fiévreux, resté fameux, moins cependant que l'Origine du Monde, racheté par Lacan comme on le sait.

Courbet est un terrien, qui peint comme il sent, de tout son être, en plein élan. Ainsi nous le raconte David Bosc, dans ce livre admirablement écrit, qui sait voir, comme Courbet voit la peinture, par le corps et les sens.

Nous sommes en Suisse, dans les dernières années du peintre qui a fui en Suisse sa condamnation absurde à rembourser la Colonne Vendôme, mise à bas au moment de la Commune, sur une idée à lui, lancée sans doute dans un de ses moments festifs, au bistrot. Condamné à peintre... quelle ironie, comme un forçat pour payer une amende colossale. A La Tour-de-Pelz, il se promène, se baigne dans le lac Léman, peint donc, à la chaîne, et se saoule pour oublier qu'il était fait pour Paris, la vie, les amis, la joie.

Le lyrisme charnu, le style plein et heureux de David Bosc à retenu les jurés du prix Goncourt, qui viennent de le mettre dans leur première sélection.

David Bosc : La claire fontaine, Verdier, 2013, 128p, 14€

Sur Musiq3, Sophie Creuz en parle

Ce  livre vous intéresse ?
Réservez-le ici.

Elue à l'Académie royale de langue et de littérature françaises de Belgique, au siège de Dominique Rolin, Sylvie Germain est un écrivain doublé d'une essayiste qui, du mystère de notre présence au monde, fait un chemin de pensée. Une œuvre littéraire couronnée de prix, le Femina pour Jours de colère, le Goncourt des lycéens pour Magnus, et une reconnaissance du public qui la suit fidèlement.

Petites scènes capitales ne déroge pas à ses thèmes de prédilection : comment se construit une identité, de quoi sommes-nous faist, quel sens donner à notre présence ici-bas, quelle place laisser au hasard et à la création de so i?

Nous suivons Lili, petite file abandonnée par sa mère, élevée par un père qui se remarie dès qu'il peut et lui donne une fratrie dans laquelle l'enfant unique doit trouver sa place. Unique ? Singulière ? Si peu regardée, si peu distinguée par ce père distant, Lili va grandir entre heurts et blessures intimes, en s'adossant aux petites scènes capitales, un arbre éblouissant de soleil, le souvenir d'une ménagerie près de la maison, l'admiration pour ses frères et soeurs d'adoption. Un livre ultra-sensible, écrit au plus près de l'âme, auréolé d'amour, et qui rend grâce à la vie.

Sylvie Germain : Petites scènes capitales, Albin Michel, 2013, 256p, 21,30€.

Ce livre vous intéresse ?
Réservez-le ici.